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La transmission du manuscrit (1)

Au fond d'un bar sombre de Port-Ellen, Giles demande à Philips si celui-ci accepterait de s'occuper de son manuscrit. S'il accepterait... l'héritage d'un inconnu, en quelque sorte.

De ce don résulte toute notre aventure.

Voici comment Philips raconte l'instant :

[Brendan Philips parle à Giles]

- Vous avez écrit vos… mémoires… dans le but de les publier ?

Il y eut un instant de silence entre nous, où l’on entendît les autres clients refaire la journée et se disputer autour de l’heure exacte de l’arrivée de la prochaine tempête.

- Je dirais que ce sera à vous d’en décider.

- À moi ?!

- Vous verrez bien. J’ai terminé d’écrire il y a quelques mois. Tout est là. Il y a des notes, mon carnet de bord, et d’autres histoires. Mon temps est passé, maintenant, et, si vous le souhaitez, vous pourrez utiliser ces textes pour vous.

Je ne savais pas quoi dire. Quoi penser.

La soirée prit ensuite une autre direction, et je n’eus pas le courage de l’interroger plus avant. Nous avons parlé de la saison qui avançait, des jours dont la longueur diminuait de plus en plus, et des travaux dans les distilleries, qu’il semblait connaître à la perfection. Je glanai ainsi quelque précieuses informations pour mon recueil.

Je ne savais pas, à ce moment, que je n’écrirais plus une seule ligne de ce travail-là.

Giles me posa des questions sur mon parcours, sur les raisons de ma venue sur Islay, souriant doucement à chaque évocation de mon passé récent, de mes erreurs et de ma fuite pour le Nouveau Monde. Parfois, au contraire, il semblait se renfermer, comme si une douleur montait en lui. Je ne sais pas pourquoi, mais je n’avais aucune peine à m’ouvrir à cet inconnu que j’allais si bien connaître. Peut-être justement à cause de ça. Je lui parlai d’Élise, lui dit que je n’avais pas su la garder. Que je le regrettais amèrement.

A l’heure de me coucher, seul dans ma chambre, alors que le port était endormi et que quelques flocons de neige venaient blanchir les carreaux, je me demandais comment il serait possible d’attendre trois jours, jusqu’à dimanche, pour le revoir, et plonger à la poursuite du temps.

Je ne trouvai le sommeil qu’avec les premières lueurs de l’aube.

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